1793 à Molosmes


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Extrait du bulletin annuel de la Société d'Archéologie et d'Histoire du Tonnerrois de 1982

(Disponible en consultation dans la bibliothèque des archives départementales d'Auxerre)

1793 à Molosmes


Article de Roger Pointel: 1793 à Molosmes

Un procès verbal de 1793 avec un sceau de cire rouge a été retrouvé dans les combles de la mairie.
Ordre d'enlèvement de trois des quatre belles cloches fondues aux frais des habitants en 1628 et 1629 :
" Jacques Cherest, procureur syndict du district de Tonnerre, en vertu des pouvoirs par lui délégués par le citoyen Garnier, représentant du peuple.
Aux citoyens composant le Conseil général de la commune de Molôme (orthographe de l'époque).
Au nom de la République une et indivisible, citoyens, il vous est enjoint de faire descendre et conduire sous trois jours à Tonnerre, trois des quatre cloches de l'église paroissiale de votre commune, à peine d'y être contraints. Les frais qui seront occasionnés par ces opérations seront acquittés par l'administrateur du district.
Fait à Molôme, le quatrième jour de la troisième décade du premier mois de la seconde année de la République une et indivisible."
La page suivante est consacrée aux adjudications des opérations qu'entraînait un tel travail. Nous y lisons à la date du 16/10/1793, qu'après plusieurs et différentes criées à haute et intelligible voix, la descente des cloches de l'église de Molôme est adjugée sur la mise de 50 livres au citoyen Simon Durand " à sa charge, risques et périls et fortune, sans qu'il soit fait aucune fracture ni dégâts et sans aucune dégradation aux murs et voûtes du clocher de ladite église "
Il est procédé ensuite à l'adjudication du " charoy pour conduire lesdites cloches promises au district de Tonnerre qui soumissionne sur la mise de 59 livres, le citoyen Joseph Chapotin, vigneron de Molôme, et qui lui est octroyée aux mêmes conditions que ci-dessus "

Dans le même temps qu'elle envoyait les cloches à la fonte, la Convention voulait imposer le décadi républicain à la place du dimanche grégorien à nos bons villageois. Mais ceux-ci rechignaient.
Trouvé le lendemain même, 17/10/1793, un témoignage d'opposition à cette mesure. Le procès verbal indique que le citoyen Cherest (toujours lui) procureur syndict du district de Tonnerre " chargé des pouvoirs illimités de citoyen représentant le peuple " a défendu, au nom de la nouvelle orthodoxie républicaine, de solenniser les dimanches de chaque semaine.
Les habitants de la paroisse de Molôme s'assemblent donc et requièrent la municipalité et le comité de surveillance de salut public de délibérer à ce sujet et dire "
Après examen de l'arrêté constitutionnel du 24-06 précédent et de la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, et " lecteurs d'ycelle ", ils invoquent les droits reconnus et proclamés de manifester sa pensée et ses opinions " soit par la voie de la presse, soit de toutes autres manières ", de s'assembler paisiblement , d'exercer librement son culte, etc… Et ils observent pertinemment : " La nécessité d'énoncer ces droits suppose ou la présence ou le souvenir de despotisme "
Ce qui était courageux et même téméraire à l'époque.
La conclusion de ce début de conscience frisait l'héroïsme étant donné les événements.
" Nous, habitants, nous avons d'une commune et unanime voix arrêté et délibéré que nous continuerons d'exercer notre culte ordinaire comme par le passé et, en outre, nous nous soumettons de célébrer les jours de repos qui nous seront indiqués par les décrets de la Convention nationale (ce qui était ingénieux).
En conséquence, enjoignons au citoyen curé de ce lieu de faire les cérémonies de notre culte les jours qu'elles arriveront, soit dimanches ou fêtes "
Au bas de la déclaration, nous avons relevé une cinquantaine de signatures " ayant signé ceux sachant le faire " selon la formule consacrée.